Charbon Kunitoraya
Yakitori d'aiguillette de volaille de Bresse, sauce uméboshi.

Petit traité de yakitori – Charbon Kunitoraya

Dernier né du brillant cerveau du chef Masafumi Nomoto, un yakitori (enfin!) ouvre à Paris. Alors ces brochettes? Les avons-nous aimées ?

Je profite aujourd’hui d’un diner qui eut lieu à l’occasion de l’ouverture de Charbon Kunitoraya pour vous parler du yakitori – que tout le monde connait mais pas vraiment. Les photos ont été prises au diner mais ne suivent pas le texte. Pour aller directement au restaurant cliquez ici

Tous les Français aujourd’hui connaissent le yakitori, ces brochettes de poulet japonaises que l’on trouve même chez Picard. Où, d’ailleurs, elles sont souvent à tout sauf au poulet: bœuf au fromage, crevettes, champignons de Paris…

(Une minute d’étymologie: yaki signifie cuire sur un feu. Tori est tout simplement poulet ou oiseau. Mais voilà… ici aussi, toute la culture japonaise, si contraire à la logique cartésienne, s’impose. Car bon nombre de restaurants de yakitori servent des brochettes de porc. Comme un de mes restaurants préférés de Tokyo, Torishige. Vous y retrouvez bien le mot “poulet”… mais ici, aucun poulet. Différentes parties du porc et quelques plats de bœuf cru.)

Charbon Kunitoraya by Masafumi Nomoto
Charbon Kunitoraya au 5 rue Villédo.

Petit traité du yakitori

Qu’est-ce qu’on mange ?

Le yakitori est un type de cuisine dans lequel plusieurs morceaux de chaque partie du poulet sont embrochés, sur des bâtonnets en bois fins et courts, et grillés au charbon sur un gril spécial. Si vous commandez une brochette de peau (kawa), vous aurez une brochette entière avec uniquement des bouts de peau. Si vous dites “suna-gimo”, vous aurez littéralement une brochette de gésiers. Si vous dites “hatsu”, vous aurez 8 cœurs de poulet alignés comme des soldats sur une brochette. Et ainsi de suite. Chaque partie du poulet est utilisé, depuis le croupion jusqu’aux cartilages, en passant par le chôchin ou lanterne, qui est l’ovaire et l’oviducte de la poule (l’ovaire accrochée au bout de l’oviducte ressemble à un chochin lanterne en papier qui pend au bout d’un bâton). Je crois que les seules parties que nous ne mangeons pas sont la tête, les pattes et les os.

Comment ça se mange ?

Le yakitori, à l’instar du sushi, fait partie de ces plats qui se mangent dans des bars, où, une fois assis sur le tabouret devant le comptoir où officient les cuisiniers, on commence par commander la boisson. Puis on commande les mets un par un, selon l’envie de l’instant. Le mets ET son assaisonnement. Car il y a toujours deux assaisonnements : l’un à la sauce (taré) l’autre au sel (shio).

Quelle cuisson ?

La cuisson est beaucoup plus complexe qu’elle en a l’air et n’est pas un simple barbecue au charbon. Pour une brochette à la sauce, le chef fait cuire une première fois puis plonge la brochette dans le pot de sauce pour faire recuire, avec la sauce, parfois deux ou trois fois. Pour une brochette au sel, il convient de la saler avant toute cuisson.

Et la sauce ?

Cette sauce taré n’est pas ce que vous croyez ! Il s’agit de la sauce sucrée salée que l’on trouve dans le commerce sous les noms sauce yakitori ou tériyaki ou même sauce soja sucrée (la sauce soja sucrée n’existe pas au Japon, qu’on se le dise !), à base de sauce soja, saké, mirin et sucre, que le cuisinier aura à côté de son gril dans un très grand pot profond. Cette sauce que l’on ne change que rarement se “bonifie” avec le temps et prend du goût avec les centaines et milliers de brochettes qui auront trempé dedans, laissant un peu de jus, un peu de gras, et au final, beaucoup, beaucoup d’umami… Voilà pourquoi il est impossible de faire un bon yakitori à la maison.

Totale liberté

On peut préférer la sauce ou le sel, chacun ses goûts et humeurs du jour. Pour ma part, j’ai mes habitudes. J’aime la peau, le foie, le blanc à la sauce. Le gras de la peau qui grésille, presque caramélisée est un vrai délice. L’amertume du foie est arrondie par le côté sucré de la sauce. Quant au blanc, il est fade, sans gras ni umami. Mieux vaut lui donner un peu de jus.

Les ailerons me font toujours hésiter entre la sauce dont le sucre se marie tellement bien avec le gras, et le sel qui le rafraichit, surtout avec un peu de jus de citron. En général, je demande les deux !

Mais je préfère le sel pour le cartilage, qui est très croquant et un tout petit peu collant. On sent que l’on fait le plein de collagène… Pour les gésiers, dont le croquant très dense se marie si bien avec un sel assez prononcé. Pour les cœurs dont j’aime le juteux un peu gras et suave, relevé de grains de sel rendus craquants par le feu. Et les croupions ! Ces petits amas 100% graisse, grésillants, que le sel complète pour donner un choc d’umami croustillant.

Ce que j’aime, c’est aller et venir entre le sucré de la sauce et le salé du sel. En sirotant un petit saké rustique… Quel délice !

Le goût du feu

Mais au fond de tout cela, il y a la raison pour laquelle tous les humains de la terre font des grillades encore aujourd’hui à l’ère de l’induction. Cet incomparable fumet du gras qui a brûlé au contact du feu et ce parfum que donne le charbon de bois à toute cuisson, sont toujours inégalés. Même le Big Egg n’y arrive pas, trop petit et trop fermé, peut-être. Alors on sort de là puant le graillon, sentant un mince film de gras sur tout son corps mais heureux, heureux comme des rois en se précipitant sous la douche.

Charbon Kunitoraya

Pour toutes ces raisons, le yakitori me manquait depuis quelque temps à Paris… et j’étais follement heureuse d’apprendre qu’un yakitori ouvrait enfin. Masafumi Nomoto n’est pas le premier venu. Il y a plus de vingt ans, il a lancé l’udon casual de type échoppe mais bon; un restaurant gastronomique autour de l’udon; vendu son ancien boui-boui d’udon pour en ouvrir un autre pas loin, plus cossu. Et enfin, a changé son ancien restaurant gastronomique en un yakitori… gastronomique.

C’est extrêmement intelligent ou intuitif, comme s’il avait un doigt dans l’air pour sentir le sens du vent. Nous y avons été invités pour l’ouverture. Le lieu est charmant et le sommelier, adorable.

Le menu omakasé était très bien ficelé. Des mets qui ne se focalisent pas sur le yakitori seul car en France, difficile de vulgariser la consommation de cartilages et de peaux que l’on n’a pas l’habitude d’apprécier, en admettant que l’on puisse en avoir suffisamment car il en faut des poulets pour faire des brochettes de cœurs ! Sans compter l’adresse technique que cela nécessite car pour que les morceaux cuisent uniformément sans brûler, sans tomber, sans se défaire, il y a des techniques pour embrocher chaque partie, en les roulant, les pliant, les coupant. Ce sont de véritables origamis que l’on mange sans le savoir. Et enfin, ce feu qui dégage une fumée de tonnerre, envahit tous nos poumons, qui doit probablement tomber sous un interdit quelconque en France – les pompiers seraient ravis !

Aujourd’hui au Japon aussi, les yakitoris “gastronomiques” où il faut réserver des mois à l’avance commencent à fleurir. Tout comme il y subsiste toujours les yakitori-ya à l’ancienne, de vrais infâmes bistrots sous les ponts dans le style du Gourmet solitaire. J’ai naturellement une préférénce pour ces derniers. Mais pourquoi pas, il faut bien vivre avec son temps, et à Paris !

Charbon Kunitoraya
5 rue Villédo
75001 Paris
Ouvert uniquement le soir.
Un seul menu Omakasé 120€
https://kunitoraya.com/#restaurant


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